Contrairement
à un rationaliste qui croit que la raison est à la source de la connaissance,
un empiriste veut déduire toutes ses connaissances sur le monde de ce que ses
sens lui transmettent. Tant dis que les rationalistes pensent que l’homme a
certaines idées innées présentes dans la conscience et qui précèdent toute
expérience, les empiristes pensent que si on a une représentation ou une idée
qui n'a aucun lien avec des faits dont on a fait l'expérience, c'est alors une
idée fausse. Les principaux empiristes étaient les trois anglais Locke,
Berkeley et Hume, alors que les grands rationalistes du XVIIe siècle étaient le
Français Descartes, le Hollandais Spinoza, et l’Allemand Leibniz. On parle
alors de l’Empirisme anglais et du Rationalisme continental.
Locke
John Locke est un anglais qui a vécu de 1632 à 1704. Son livre le plus important est intitulé « Essai sur l'entendement humain » paru en 1690. Ce livre discute d’une part l'origine des pensées et des représentations chez l'homme, et d’autre part le problème de la fiabilité des sens.
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Pensée | 
Détails – Extraits du livre | 
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Locke est convaincu que toutes les pensées et les images qu’on a dans la
  tête sont le fruit de diverses expériences. Avant de ressentir quelque chose,
  la conscience est vierge. | 
- Locke compare aussi la conscience avec une pièce sans meubles. Nous
  commençons à percevoir le monde autour de nous grâce à la vue, l'odorat, le
  goût, le toucher et l'ouïe. Les petits enfants sont imbattables sur ce point.
  De cette manière naissent ce que Locke appelle des idées sensorielles
  simples. 
- Mais, la conscience n'accepte pas passivement les idées sensorielles
  simples, elle les confronte, les soumet à divers raisonnements, les met
  en doute, etc. De ce travail intellectuel surgissent ce que Locke appelait les
  idées réflexives. Locke opère une distinction entre la « perception »
  et la « réflexion ». | 
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Locke souligne aussi que les sens permettent seulement d'accéder à des
  impressions simples. | 
Quand je mange une pomme par exemple, je ne vois pas la pomme comme un
  tout, mais j'ai une série d'impressions juxtaposées les unes aux autres : je
  perçois quelque chose de vert qui dégage une impression de fraîcheur et dont
  la saveur est un peu acide. Ce n'est qu'après avoir mangé une pomme plusieurs
  fois que je pourrai formuler clairement la pensée : je mange une « pomme ».
  Locke dit que nous avons obtenu une « vision synthétique » de la
  pomme. | 
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Locke distingue dans le domaine des sens les qualités « primaires »
  des qualités « secondaires ». | 
Les qualités primaires des sens recouvrent le volume, le poids, la forme, le mouvement et le
  nombre des choses. Nous pouvons affirmer que nos sens nous renseignent
  utilement sur ces qualités. Mais nous disons aussi que quelque chose est
  sucré ou acide, vert ou rouge, chaud ou froid : c'est ce que Locke appelle les
  qualités secondaires des sens. Et ces impressions telles que la couleur,
  l'odeur, le goût ou le son, ne sont pas des qualités immanentes aux choses.
  Elles ne reflètent que l'effet produit sur nos sens. | 
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- Locke
  rejoint Descartes en reconnaissant qu'il existe certaines qualités que la
  raison de l'homme peut appréhender.  
- Locke affirme que la raison humaine porte en elle l'idée de Dieu. | 
- Locke ouvre la voie à un savoir intuitif ou « démonstratif ». Certaines
  règles morales fondamentales valent selon lui pour tous. Il se fit le chantre
  de ce qu'on a appelé le droit naturel, ce qui est un trait du rationalisme. 
- L'idée de Dieu n'est pas pour lui une question de foi, mais de raison
  inhérente à l'homme. | 
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Locke s'intéressait également à l'égalité entre les sexes. | 
Il pensait en effet que la position subordonnée de la femme par rapport à
  l'homme n'était pas une donnée de la nature, mais bien le fait des êtres
  humains. | 
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Locke avait insisté sur la nécessité d'une séparation entre le pouvoir
  législatif et le pouvoir exécutif pour éviter la tyrannie. | 
Pour fonder un État sur le droit, il faudrait selon Locke que les
  représentants du peuple rédigent les lois et laisser le roi ou le
  gouvernement les mettre en application. | 
Hume
David Hume est un anglais qui a vécu de 1711 à 1776. Hume grandit en Ecosse dans les environs d'Edimbourg. Sa famille voulait qu'il devienne un homme de loi, mais lui prétendait qu'il «sentait une aversion irrésistible envers tout ce qui n'était pas philosophie ou culture générale». Il passa une grande partie de sa vie à voyager en Europe avant de s'établir à Edimbourg. Il avait vingt-huit ans quand son livre: « Traité de la nature humaine » a été publié. Hume voulait mettre de l'ordre dans les concepts et les constructions intellectuelles des précédents philosophes, car on trouvait à cette époque aussi bien des croyances héritées du Moyen Âge que les pensées des rationalistes du xvIIe siècle. Il disait : « aucune philosophie ne pourra nous mener au-delà des expériences quotidiennes ou nous donner des règles de conduite différentes de celles qu'une réflexion sur la vie de tous les jours nous permet de trouver ».
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Pensée | 
Détails – Extraits du livre | 
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Hume distingue deux types de représentations chez l'homme : les impressions
  et les idées. Les « impressions » sont les perceptions vives et
  immédiates du monde extérieur tandis que les « idées » sont les
  souvenirs attachés à ces impressions. | 
Si tu te brûles à un poêle trop chaud, tu ressens une « impression
  » immédiate. Par la suite, tu vas y repenser et c'est ce que Hume appelle une
  «idée». Avec cette différence que l'impression est beaucoup plus forte
  que le souvenir après coup. Autrement dit, l'impression des sens est
  originale alors que le souvenir n'est qu'une pâle copie, car l'impression est
  la cause directe de l'idée qui va se nicher dans la conscience. | 
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Hume explique qu'une impression ou une idée peut être soit simple
  soit associative. | 
Tu te souviens que nous avons parlé d'une pomme à propos de Locke en
  disant que cette pomme était justement une « association d'impressions ».
  Nous pouvons aussi affirmer que la pomme est une « idée associative ». | 
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Hume s'attaquait à toutes les représentations pour les décomposer en
  impressions simples et voir si elles correspondent à quelque chose de réel.
  Hume voulait montrer qu’ils existent des idées sans qu'elles correspondent à
  quelque chose de réel. Contrairement à Descartes qui affirmait qu'une idée «
  claire et distincte » correspondait obligatoirement à quelque chose de réel. | 
Il était communément admis à l'époque de Hume que les anges existaient.
  Qui dit ange veut dire un corps masculin avec des ailes. Selon Hume, l'« ange
  » est une « association d'idées ». Deux expériences différentes dans la
  réalité se trouvent arbitrairement réunies par l'imagination de l'homme. En
  d'autres termes, c'est une représentation fausse comme tant d'autres dont il
  faut se débarrasser au plus vite. | 
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Hume pensait que le faite que nous voyons en Dieu un être infiniment «
  intelligent et bon », n’est qu’une association d'idées avec d'un côté
  quelque chose d'intelligent et de l'autre quelque chose de bon. | 
Si nous n'avions su ce qu'était l'intelligence ou la bonté, nous
  n'aurions pu forger un tel concept de Dieu. Hume disait : « Si nous
  prenons en main n'importe quel livre sur la conception de Dieu ou la
  métaphysique, nous devrions nous poser la question : contient-il le moindre
  raisonnement abstrait concernant la grandeur ou le nombre? Non. Contient-il
  le moindre raisonnement fondé sur l'expérience concernant les faits et
  l'existence? Non. Alors jetons-le aux flammes, car il ne peut contenir que
  des élucubrations de sophistes et des rêveries avortées. » | 
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Hume refuse le faite de démontrer l'immortalité de l'âme ou l'existence
  de Dieu. Selon lui, fonder la foi religieuse par la raison humaine relevait
  de l'hérésie rationaliste. Hume n'était pas chrétien, mais il n'était pas non
  plus athée. Il était un agnostique : Il ne sait si Dieu existe. | 
Il ne reconnaissait comme vrai que ce qu'il avait perçu comme tel par ses
  propres sens. Il laisse sinon le champ ouvert à toutes les hypothèses. Il ne
  rejetait pas la foi chrétienne ou la croyance aux miracles. Mais dans les
  deux cas il est question de foi et non de savoir ou de raison. | 
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Hume dit que la représentation du moi est une collection de divers
  contenus de conscience qui se succèdent à toute vitesse et qui changent et
  bougent constamment. | 
Nous n'avons donc pas de personnalité de base où viendraient s'inscrire
  et s'enchaîner par la suite
  toutes les émotions et les concepts. Le sentiment d'avoir un noyau de personnalité irréductible et immuable
  est donc illusoire. La représentation du moi est en fait une longue chaîne
  d'impressions isolées que tu n'as pas vécues simultanément. | 
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Hume pense que les prétendues « lois naturelles» comme la « loi
  de cause à effet » relèvent de l'habitude et ne sont aucunement fondées
  sur la raison. Nous ne naissons pas avec des idées préconçues sur la bonne
  marche du monde. Le monde se présente à nous tel qu'il est et nous le
  découvrons jour après jour grâce à nos sens. | 
Dans le lien de cause à effet, on peut citer le phénomène de l'orage où
  beaucoup s'imaginent que l'éclair est la cause du tonnerre parce que le
  tonnerre a toujours quelques secondes de décalage avec l'éclair. Cependant,  l'éclair et le tonnerre se produisent simultanément
  parce que tous deux sont le résultat d'une décharge électrique. Ainsi on voit
  qu'en réalité c'est un troisième facteur qui est la cause de ces deux
  phénomènes. | 
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Hume soutient que ce n'est pas la raison qui détermine ce que nous disons
  ou faisons mais ce sont nos
  sentiments contrairement à la pensée rationaliste selon laquelle la différence
  entre le bien et le mal est inscrite dans la raison de l'homme. | 
Après des inondations catastrophiques, n'est-ce pas seul notre cœur qui
  nous pousse à agir pour secourir les populations sinistrées? Si nous n'avions
  pas de sentiments et laissions parler notre « raison froide », ne
  pourrions-nous pas penser qu'au fond ce n'était pas une si mauvaise chose, puisque
  ça supprime des millions de gens dans un monde déjà menacé par la
  surpopulation? | 
Berkeley
George Berkeley était un évêque irlandais qui a vécu de 1685 à 1753. Berkeley ne se contente pas de mettre en doute la réalité matérielle, mais aussi le temps et l'espace qui selon lui n'ont absolument pas d'existence indépendante. Notre perception du temps et de l'espace est quelque chose qui n'existe que dans notre conscience.
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Pensée | 
Détails –
  Extraits du livre | 
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Berkeley pensait que les choses ne sont pas des « choses ». Mais
  elles sont exactement comme nous les percevons. Selon Berkeley, la seule
  chose qui existe est ce que nous percevons. | 
Contrairement à  Locke qui avait
  insisté sur le fait que nous ne pouvons rien dire sur les qualités
  secondaires des choses. Nous pouvons affirmer qu'une pomme est verte et
  acide, mais cela n'engage que nous. Par contre les qualités primaires telles
  que la masse, le volume et le poids appartiennent réellement au monde
  extérieur qui, lui, a une « substance » physique. 
Locke pensait à la suite de Descartes et Spinoza que le monde physique
  est une réalité. | 
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Berkeley prétendait que toutes nos idées ont une cause extérieure à notre
  propre conscience, mais cette cause est de nature spirituelle et non
  matérielle. | 
Selon Berkeley, seul Dieu est la cause des idées qui déterminent notre
  monde matériel. Tout découle de l'esprit « qui agit en toute chose et en quoi
  toute chose consiste », disait-il. | 
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Berkeley affirme avec certitude l'existence de Dieu. Ce dernier est la
  clé de son système au sens où l'existence de Dieu est le seul moyen d'assurer
  la vérité de nos perceptions, en l'absence de réalité matérielle extérieure
  avec laquelle nos perceptions pourraient s'accorder. | 
Berkeley disait que « nous pouvons même affirmer que l'existence de Dieu
  est beaucoup plus clairement perçue que celle des hommes ». 
Tout ce que nous voyons et sentons est « une conséquence de la puissance
  de Dieu », rappelait Berkeley. Car Dieu est « intimement présent dans notre conscience
  et fait surgir toute cette multitude d'idées et de perceptions auxquelles
  nous sommes sans cesse exposés ». Le monde entier ainsi que toute notre
  existence reposent entre les mains de Dieu. Il est l'unique cause de tout ce
  qui est. | 
A suivre …
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Rachida KHTIRA 
Software Engineer at the Moroccan Ministry of Finance. 
Interests: Reading, travel and social activities. | 


